Les poêles de masse, champions du confort
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Par Gwendal Le Ménahèze
Publié le 11 octobre 2024
Portfolio des différents poêle de masse.
Le poêle de masse offre une combustion très performante, qui réduit la consommation de bûche et les pollutions par rapport à un poêle à convection. Notamment grâce à un feu vif à très haute température. Il accumule la majorité de la chaleur dans des matériaux lourds (brique, pierre, terre crue...), puis la restitue tranquillement dans l'habitation. Une flambée de 1 à 2 h diffuse une chaleur douce durant 12 à 24 h. Son poids de 0,6 à 6 t (selon puissance, inertie et temps de restitution recherchés) peut imposer un renfort du plancher. Cette forte inertie thermique implique qu'un poêle de masse (PDM) prend du temps à chauffer... et à arrêter de chauffer. Il n'est donc pas adapté aux absences longues et répétées et les intersaisons peuvent être délicates à gérer (il faut anticiper les besoins), mais c'est un apport très intéressant dans certaines maisons en bois manquant d'inertie. Un PDM n'est pas spécialement puissant. « Ses 0,8 à plus de 8 kW s'expriment en puissance moyenne sur 24 h (énergie de la ou des flambées sur le temps de restitution) et non en puissance nominale pendant la flambée comme sur un poêle en métal », précise Aurélien Germain-Thomas, coordinateur de l’Association française du poêle maçonné artisanal (AFPMA). Il se marie mieux avec un bâtiment aux besoins énergétiques modérés. © Damien Lehmann
L’AFPMA œuvre au partage de connaissances, de savoir-faire et d’expériences, à faire reconnaître le métier de poêlier, rédiger des règles professionnelles et guide des bonnes pratiques, développer un laboratoire de recherche aux normes européennes, créer des formations. 51 personnes ont été formées au dimensionnement (1 350 €) en deux ans. Un module sur la maçonnerie réfractaire est en préparation et une formation longue pour le Certificat de qualification professionnelle inscrit au RNCP est prévue pour 2025. Le logiciel autrichien Basic2+ permet de calculer et justifier des performances de chaque poêle sur mesure. L'association développe un logiciel de dimensionnement propre aux spécificités françaises. Elle travaille à ce que le poêle maçonné soit mieux reconnu comme chauffage principal et que les réglementations évoluent en conséquence, ce qui augmenterait notamment les aides pour en installer. © Jérôme Chapelle
Le dimensionnement de ce « poêle à accumulation » et le choix de sa courbe de restitution de chaleur sont ajustés au bâtiment qui l'héberge (localisation, volume des pièces, isolation, inertie, ventilation...) et au mode de vie de ses usagers. Un décloisonnement évite de freiner la diffusion de la chaleur, qui se fait principalement par rayonnement infrarouge ; il chauffe les murs, sols, corps et n'assèche pas l'air. Poêlier en Anjou, Michel Bertrand précise que « si la maison est bien isolée, les températures s'homogénéisent au bout d'un certain temps. Si l'espace est ouvert ou que les cloisons sont légères, l'égalisation sera plus rapide ». Obtenir la même température partout « restera difficile, nuance l'artisan poêlier Jérôme Chapelle. Mais si une chambre d'amis est loin du poêle, ce n'est pas grave. Il faut surtout que les pièces de vie et le bureau où un télétravailleur passe du temps statique soient proches et pas trop cloisonnés ». © Michel Bertrand
Des modèles comme le PM800 de la SAS Le Mélèze peuvent intégrer un réseau d’eau pour chauffer des maisons peu compactes (bouilleur à 972 € HT). Fabriqué dans la Drôme, PM800 pèse 940 kg, a une puissance moyenne de 5 kW, un rendement de 86 %, émet 0,04 % de CO, 30 mg/Nm3 de poussières. Il peut servir de chauffage principal pour 200 m2 bien isolés. 12 319 € HT en coloris sable, hors conduits. Installation complète hydro-solaire en thermosiphon : environ 9 000 € de plus. Option four à 829 €. La diffusion de la chaleur peut être facilitée en intégrant un PDM dans une paroi entre deux pièces. Des trappes peuvent aussi la distribuer dans d'autres pièces. © Poêle Mélèze
Les poêles maçonnés artisanalement sur place réclament une main d'œuvre importante. Selon la taille, la complexité, les finitions et options (banquette chauffante, four, cuisinière, chauffe-eau...), ils coûtent 10 000 à 25 000 €, voire plus si « artistiques ». Des stages pour apprendre à autoconstruire un PDM ou le bâtir en chantier participatif sont proposés par des poêliers, l'association Oxalis, Feu vivant ou La Maison en paille (330 à 500 €). L'Oxalibre (ci-contre) se compose de matériaux simples et les plans et guide de montage sont en libre accès. Il coûte 4 000 à 5 000 € et pèse 2 à 2,7 t. Christophe Modoux, formateur et constructeur de PDM chez Lowtonom (39), a réalisé en 2024 des tests sur deux modèles ; le « M » affiche un rendement de 88 % et des émissions de CO à 451 ppm. © Jordan Remy
Des fabricants ont trouvé des astuces pour contourner le frein réglementaire, comme le français Hiemstra et son option de régulation automatique (1 400 € HT). « Sur les poêles maçonnés, une régulation thermique par convection ou un "écran thermique réglable" peuvent être installés, propose l'AFPMA. Ça passe même sans ce dispositif quand le maître d’ouvrage fait ce qu’il faut avec un thermicien ou maître d’œuvre convaincu. Car en réalité le poêle maçonné, avec sa libération lente de chaleur par rayonnement, s'autorégule. » Les kits Hiemstra coûtent 10 135 à 15 368 € HT + 1 106 à 1 486 € de pose. Option bouilleur à 1 449 €. Ce modèle NO80 pèse 1,5 t, affiche 5,4 kW, 98,5 % de rendement, 0,1 % de CO, 35 mg/Nm3 de particules fines. © Poêle Hiemstra
Préconisé pour une maison jusqu'à 90 m2 en chauffage principal, l'Alsamasse pèse 1 à 1,2 t. Son rendement est de 92 %. 0,12 % de CO, particules < 40 mg/Nm3. Modèle 1 vendu en kit (montage 1 600 €) à partir de 3 805 € (modèle flamme inversée pour autoconstruction) ou 4 320 € modèle certifié. Option chauffe-plat à 800 €. © Alsamasse
Conçu pour l'autoconstruction à moindre coût, le poêle rocket peut être réalisé avec des matériaux de récupération : baril métallique, briques réfractaires, terre, paille, cailloux, isolant incombustible (vermiculite, perlite, pouzzolane, pierre ponce). Le chantier est accessible aux bricoleurs, mais ne doit pas être pris à la légère : un défaut sur un appareil de chauffage au bois expose à des risques d'incendie, d'intoxication... Il existe des stages et forums (forum.poeledemasse.org) sur le sujet. Le livre Rocket stoves - Feux de bois et poêles de masse décrit les étapes de conception, réalisation, mise en route et entretien. © Kira Brandt - Design Architect Flemming Abrahamsson
De nouveaux modèles alternatifs se développent, comme les Rocket Batch Box, Double Shoebox Rocket, ou Rocket Batchblock telle la cuisinière de masse (950 kg) avec four et plancha autoconstruite pour 1 500 € par la famille Glaziou, dont elle chauffe le logement dans le Tarn (reportage dans notre hors-série n°13). Ou ce modèle open source d'Uzume, qui coûte 7 000 à 9 000 € TTC en kit pour autoconstruction, ou 10 000 à 13 000 € par un poêlier. Version « améliorée » du rocket stove, le chargement du bois s'y fait horizontalement et une vitre permet de contempler les flammes. © Uzume
Jérôme Chapelle développe un Rétrostove pour « éviter de recourir aux appareils fabriqués à l'étranger et favoriser le réemploi de poêles et inserts existants ». Il en améliore les performances en leur adossant un accumulateur thermique, banquette ou mur chauffants. « Ces poêles sont plus modulables, avec une puissance instantanée plus importante comme un poêle en fonte, mais avec une accumulation en plus, une plaque de cuisson... » Des mesures sur deux premières réalisations ont montré un rendement supérieur à 80 %, 37 % de consommation en moins, des émissions de CO2 réduites de 50 %, de particules de 75 %. « Avec un accumulateur maçonné sur mesure pour 800 à 2 700 € HT et 300 à 1 300 € d'upgrade simple du poêle, le chantier est amorti en 3 à 9 ans. » © Jérôme Chapelle
Pour s'adapter aux maisons de plus en plus performantes ou aux petits habitats, Agir low-tech développe en open source le MiniMasse (0,7 à 2,1 kW) et travaille à sa certification. Démontable et assemblable en deux jours, il intègre un chauffe-plat et un four. Pour 3 000 € de matériaux, il peut être autoconstruit lors d'un stage (1 700 à 2 000 €). Ce prototype bâti en atelier par David Mercereau, puis remonté dans sa maison de 40 m2 pèse 500 kg de brique réfractaire et mesure 66 x 66 x 90 cm. Il remplace un poêle en fonte, qui utilisait le même combustible, « mais finie la surchauffe au moment de la flambée. La température reste constante nuit et jour. Les murs et le sol sont chauds ». Une « mini étude » lui a montré que, pour la même quantité de bois, la température initiale est de retour en 5 h avec le modèle en fonte, alors qu'avec le MiniMasse elle n'y est toujours pas redescendue au bout de 20 h. La surface du poêle en fonte atteint 392°C et 50 % de cette chaleur a disparu 30 min après la fin de flambée ; celle du MiniMasse monte à 76,6°C et 50 % sont encore là 10 h après. © Gwendal Le Ménahèze
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