Tiny House, de la difficulté à poser ses roues 2/2
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Par Maïlys Belliot
Publié le 21 juin 2023
Le statut de la tiny house, à la fois mobile et sédentaire, complique sa considération en tant qu'habitat dans les documents d'urbanisme. A moins de faire des compromis…
Mathilde a autoconstruit sa tiny house en 2016 et vécu un an sur « une grande prairie entourée d’arbres », parcelle constructible d’un particulier.
Tout n’était que « confort et douceur de vivre ». Jusqu’à ce que ce terrain soit vendu. Les années qui ont suivi, Mathilde n’a pas trouvé d’autre lieu d’accueil, malgré sa sollicitation des réseaux et de la presse. Sa tiny a été gardée chez un constructeur et dans un camping. « Puis, j’ai senti un besoin d’ancrage, d'un endroit à moi duquel on ne pourrait pas me virer. » Elle a acheté une maison à rénover et y a déménagé sa tiny house. « Mais le maire ne l’a autorisée que le temps des travaux. » En août 2020, elle a fini par la vendre. « J’étais à la fois soulagée de ne plus me cacher et triste, car j’y avais projeté mes rêves », confie-t-elle. Pour se sédentariser, les « tinystes » doivent se déclarer en mairie, sous peine d’une contravention(1). Mais dans les règlements d’urbanisme, aucune case ne correspond à l’ambivalence du statut de la tiny house, mobile et sédentaire, déplaçable mais rarement tous les mois.
La tiny peut entrer dans le cadre fixé par la loi Alur(2) qui oblige, depuis 2014, la prise en compte dans les documents d’urbanisme de l’habitat « facilement et rapidement démontable », sans fondations et occupé à titre de résidence principale. Son installation est autorisée en zone constructible, moyennant une déclaration préalable (surface plancher < 20 m2) ou un permis de construire (à partir de 20 m2), ainsi qu’en zone agricole ou naturelle sur les secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées (Stecal), qui demeurent rares(3). Or, « le caractère mobile de la tiny house, l’autorisant à circuler sur la route, l’assimile à une caravane », explique Christophe Herbreteau, architecte- urbaniste chez le fabricant Bicok. À ce titre, « elle peut être autorisée trois mois dans le jardin de votre résidence principale avec interdiction d’y habiter, dans les campings, voire sur un terrain privé avec accord du propriétaire. Au-delà de trois mois, une déclaration préalable est nécessaire ». Pour coller à la définition donnée par la loi Alur, « la tiny house doit être désolidarisée de ses roues ».
Christophe, comme d’autres fabricants désormais, conseille de trouver un terrain constructible avant d’envisager la tiny, afin de vérifier sa conformité avec le règlement d’urbanisme, puis formuler une déclaration préalable (ou permis de construire) « sans mentionner les roues ». Quant à déménager, il faut demander un permis de démolition. La nouvelle ne réjouit pas les rêveurs de liberté. Certains préféreront compter sur la compréhension d'élu.es qui tolèrent une installation non règlementaire… Mais jusqu’à quand ?
Le Ty Village d'Aurélie Moy
Aurélie Moy a réussi à installer plusieurs tiny houses sur une propriété familiale située derrière le campus universitaire de Saint- Brieuc (22). L’idée était de proposer des logements aux étudiants tout en sensibilisant à l’habitat réversible. Depuis 2019, la société Ty Village compte 21 emplacements, 15 tiny houses en place. Toutes sont en location sauf une, occupée par sa propriétaire. La commune a approuvé le projet à condition que la jeune entrepreneuse de 26 ans se fasse accompagner par un architecte-conseil pour la réalisation du permis d’aménager. Elle confie que « les travaux, la gestion de la viabilisation, les chemins d’accès aux tiny, les mouvements du terrain ont représenté une énorme charge de travail ». Et un coût notable : 700 000 €, dont 100 000 € d’aménagement du terrain. Les loyers des tiny houses (459 €/mois charges comprises, éligible APL) et des emplacements (242 €/ mois CC) participent à son amortissement.
A écouter : Le podcast dans lequel Aurélie Moy raconte toutes les étapes de construction du Ty Village
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