Si vis pacem, para pacem(1)

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Par Thierry Salomon

Publié le 20 mai 2025

3 minutes de lecture


Si vis pacem, para pacem(1)

Déconcertante époque, où l’écologie et le climat ont tout d’un coup disparu au profit d’un nouveau mantra : la Défense. Une défense exclusivement militaire, déclinée en nombre de chars, de missiles et de centaines de milliards d'euros qui feront le bonheur des industries de l’armement.

Mais est-ce le seul moyen de se défendre ? Ne faudrait-il pas également penser « Défense » par la réduction de nos dépendances et le renforcement de notre autonomie ? D’où cette affirmation aujourd’hui iconoclaste, mais pourtant logique : la transition écologique et énergétique renforce la Défense nationale.

Bien sûr, on m’objectera avec un brin de compassion que ce n’est pas avec des éoliennes, des légumes bio ou des isolants que l’on va se défendre. Posons alors la question autrement : demain, en cas de conflit, quel système électrique est le plus robuste ? Le nôtre, hypercentralisé et reposant sur 18 centrales nucléaires qui peuvent être en quelques heures rendues inopérantes par des missiles ou des nuées de drones ? Ou bien un réseau fractal de centaines de milliers de points de production d’énergie collectant localement des ressources inépuisables, le vent et le soleil ?

En cas de nouvelle et sévère pandémie, quel est le mode de production alimentaire le plus résilient ? Le nôtre, reposant sur des achats massifs d’intrants, des centrales de production et des norias de camions de distribution ? Ou bien une agriculture à proximité des centres urbains, en circuit court, bien moins dépendante des semences, engrais et pesticides ?

Continuons. Dans le numérique, quel système est le plus sécure ? L’actuel qui repose sur des entreprises privées susceptibles selon leur bon vouloir de bloquer tout échange de données, de s’infiltrer dans nos outils et de manipuler l’information ? Ou bien un numérique fondé sur des applications en open source, des réseaux gérés en biens communs, régulé par des instances indépendantes de l’ego de quelques multi-milliardaires en mal d’hubris ?

Pour nos besoins essentiels en mobilité, quel est le moins risqué ? Être piégé par notre invraisemblable addiction à un pétrole importé à 99 % et dont le prix spéculatif doublera en cas de crise majeure à des milliers de kilomètres de chez nous ? Ou bien s’engager enfin dans une mobilité plus sobre, plus responsable et non-fossile ?

Le dicton « si vis pacem, para bellum(2) » date, dit-on, de l’Antiquité. Mais il reste la ligne de conduite de dirigeants aussi prompts à augmenter le budget de l’armement qu’à réduire celui d’une écologie jugée punitive, normative et finalement accessoire. Pourtant, notre impératif vital est de faire advenir un monde plus sûr pour tous et pour tous les risques. Un monde où le mot « défense » ne devrait pas être réduit à sa seule vision militaire, mais étendu à l’« armement collectif et citoyen » que procure une politique radicale de transition écologique et énergétique. Un monde où les dommages collatéraux de cet « armement » sont bénéfiques sur le climat, l’emploi, le pouvoir d’achat, la biodiversité…

Un monde où le ministère de la Défense et l’École de guerre devraient en être les premiers promoteurs, ayant enfin compris que « si vis pacem, para pacem(1) ».

1. Si tu veux la paix, prépare la paix.

2. Si tu veux la paix, prépare la guerre.

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