Billet d'humeur : Un quart de siècle !
Par Thierry Salomon
Publié le 26 novembre 2025
La Maison écologique a donc 25 ans. L'âge de la maturité, la durée de 25 révolutions autour du Soleil déclinée en 150 opus. Au fait, comment était le monde à la naissance de la revue en l’an 2000 ? Avec le recul que permet un quart de siècle, ce qui frappe c’est la concordance ces années-là des innovations technologiques numériques qui ont transformé le monde les 25 années suivantes. Qu'on en juge :
Le réseau Wi-Fi sous sa forme quasi actuelle date de 1999. La clé USB 2 est née en 2000 tout comme l’ADSL [prélude à la haute vitesse pour l’Internet]. En Californie une petite société, fondée en 1998, a véritablement décollé en 2000 avant de s’installer dans nos vies et nos milliards d’objets numériques. Son nom annonçait déjà sa folle ambition : un google c’est 10 puissance 100, nombre égal à un milliard de milliards de fois le nombre d’atomes dans l’univers observable…
2000 est aussi l'année où le gouvernement états-unien a rendu le signal GPS civil plus précis en arrêtant son brouillage. Un quart de siècle plus tard, plus personne ne s'étonne d’être positionné – donc observé – où que l'on soit sur Terre à 5 m près, un prodige que les religions pensaient jusqu’à présent réservé à leurs seules divinités célestes.
Outre la naissance de La Maison écologique, l’année 2000 a donc été celle du passage d’un millénaire à l’autre et de l'analogique au numérique. Une révolution qui a envahi, pour le meilleur et peut-être le pire, nos courriers, notre vie quotidienne, nos ordinateurs, nos téléphones et montres connectées. Un tsunami numérique tel que les jeunes enfants ne savent plus lire l’heure sur – quelle vieillerie bizarre ! – une pendule avec deux aiguilles.
La Maison écologique, sous sa forme imprimée, a su heureusement résister. Elle reste un bel objet amené par un humain, le facteur, puis déballé comme un cadeau que l’on feuillette avec plaisir et curiosité. Elle se lit avec nos seuls yeux, sans les artifices d’un ordinateur, d’un écran, d’une connexion Internet, de la fibre et d’un serveur. On peut la prêter à ses amis ou bien la laisser traîner dans des endroits stratégiques, la table du salon, le chevet de son lit, voire dans un coin plus intime où le temps de lecture de son « billet d’humeur » peut être agréablement couplé à l’usage du lieu ! Puis, à l’arrivée bimestrielle du numéro suivant, on garde le précédent, tout à fait incapable de l’abandonner lâchement dans une poubelle, fusse-t-elle pour recyclables.
Évidemment, cette manie conservatrice qui porte un nom de maladie, la syllogomanie, n’est pas sans risques. 150 numéros, c’est au bas mot 10 000 pages et 28 kg sur 75 cm de rayonnage. Un seul déménagement, une étagère un jour branlante, une inondation scélérate suffisent à réduire à néant la collection du syllogomane éploré. Pire encore, il lui faut supporter des remarques d’une implacable logique (« M’enfin, pourquoi tu t’obstines à garder ces vieilleries que tu ne relis JAMAIS ? »). Ou, pire encore, affronter des idées proprement sacrilèges (« Dis donc, tu crois que ta précieuse collec’, ça vaut quelque chose sur Leboncoin ? »).
Alors, envers et contre tout et tous, bravant l’adversité, je conserve pieusement les 150 numéros du premier quart de siècle, prêts à attendre les 150 du quart suivant. Absolument certain que tous se bonifieront avec le temps tels de bonnes bouteilles.

