Autoconstruction, les assurances dans la balance

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Par Maïlys Belliot

Publié le 1 novembre 2022

7 minutes de lecture


Coincée entre une injonction sociale, une incompréhension de son fonctionnement et une réglementation inadaptée, l’assurance d’une autoconstruction se fait complexe et angoissante. Alors qu’il s’agirait peut-être d’en faire le deuil...

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Mieux vaut consacrer son énergie à motiver son projet d’autoconstruction face aux financeurs plutôt qu’à chercher à l’assurer. Un vrai casse-tête ! ©M. Belliot

Dans les yeux des autoconstructeurs qui courent après une assurance pour leur projet de maison, on voit vite une sorte d' "erreur 404". Ils subissent une injonction sociale à répondre "oui" à la question "es-tu assuré ?", ils ont peur d’être dans l’illégalité, peur des problèmes en cas d’accident… Et de nombreuses structures font leur beurre sur ces inquiétudes », analyse Cédric Avramoglou, fondateur de Twiza, réseau d’entraide pour l’habitat écologique et participatif. Nombreux sont ceux qui cherchent le Graal. Certains se targueront de l’avoir trouvé. Lui affirme sans équivoque qu’assurer son autoconstruction « est techniquement impossible ».


Une législation inadaptée

Faute à un cadre législatif inadapté. Jérome Blanchetière, avocat spécialiste du droit immobilier, de la construction et des assurances, rappelle qu’en construction, seules deux assurances sont obligatoires depuis la loi Spinetta de 1978 : la « responsabilité civile professionnelle », plus couramment nommée « décennale », et la « dommage-ouvrage » (DO). La première doit être souscrite par les constructeurs professionnels. Elle s’applique sur les ouvrages qu’ils réalisent, durant les 10 années qui suivent leur achèvement, pour indemniser la victime de tout « dommage compromett[ant] leur solidité ou les rend[ant] impropres à leur destination ». La DO, elle, doit être souscrite par le maître d’ouvrage avant le début des travaux. Elle lui permet d’être indemnisé dès qu’il déclare un sinistre relevant de la décennale du constructeur(1). Ensuite, l’assurance du maître d’ouvrage et celle du professionnel s’arrangent.


Seulement, en autoréalisation, l’autoconstructeur est seul responsable des dégâts sur son bâti. Là, ça cafouille. Car la DO demeure obligatoire sur le papier, mais ne peut pas être souscrite en pratique. Cédric Avramoglou explique : « Elle ne s’appuie QUE sur une décennale, elle est comme un relais » – une « subrogation », précise l’avocat(2). Attention à toute compagnie qui proposerait une solution miracle, comme la « DO autoconstructeur » au coût exorbitant ou des assurances non obligatoires au contenu librement fixé par les parties… « C’est bien pour les compagnies qui les vendent, moins pour les autoconstructeurs qui les paient en désespoir de cause », déplore le fondateur de Twiza.


Pour qu’elles indemnisent vraiment le jour où gros sinistre il y aurait, croiser les doigts… Après tout, « vous imaginez mal faire un travail sans rémunération et être payé pour le refaire. Ce serait la fête ! », ironise-t-il. Conclusion : faire le deuil d’une assurance sur sa construction, assumer la réparation de ses propres erreurs et… ne pas vendre dans les 10 ans. Quels risques pénaux pour non souscription à la DO ? Jérôme Blanchetière rassure : « Il n’y [en] a pas pour la personne physique construisant un logement pour l’occuper elle-même. »(3)

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Si un ouvrage autoconstruit ne peut être couvert de la même manière que celui réalisé par un professionnel, il reste tout à fait possible, une fois terminé, de l’assurer comme n’importe quel habitat avec un contrat « multirisques ». ©M. Belliot

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