20 ans après

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Par Thierry Salomon

Publié le 22 janvier 2024

3 minutes de lecture


En 2003 – il y a déjà 20 ans –, 17 passionnés se réunissaient pour parler économies d’énergie et énergies renouvelables, tous adeptes d’un drôle de mot à une époque où il fallait po-si-ti-ver : négaWatt. Très vite, ils eurent la conviction qu’il fallait ne pas en rester à quelques idées, mais quantifier une trajectoire énergétique usage par usage et année par année. Pour la production d’énergie, bien sûr, mais aussi pour la consommation d’énergie, cette éternelle oubliée des scénarios productivistes de l’époque. En bons praticiens de l’énergie, ils ouvrirent un tableur Excel pour y remplir quelques cellules. Des cellules-souches, en quelque sorte, qui proliférèrent ensuite jusqu’à remplir aujourd’hui, cinq scénarios plus tard, de monstrueux tableaux de plus d’un million de cellules.

Mais en 2003, réaliser un scénario ne suffisait pas. Il fallait aussi expliciter les fondamentaux de la « démarche négaWatt » qui sous-tendaient cette construction : prioriser les usages essentiels, réduire les gaspillages et utiliser le soleil ! Et interpeller les décideurs en proposant, face aux risques et aux impasses, un avenir énergétique souhaitable. Ils décidèrent alors de rédiger un « Appel négaWatt », un texte court sur une page et deux colonnes(1).

« 20 ans après », cet appel de ces 17 mousquetaires de 2003 est toujours d’une étonnante actualité, et pourrait presque être republié tel quel.

Que disait-il ? Tout d’abord, il prenait le contre-pied de la plupart des études prospectives des experts de l’énergie de l’époque. À de rares exceptions près, ceux-ci ne pensaient qu’en termes de production croissante d’énergie. Pour eux, l’avenir était à l’évidence électro-nucléaire et ils se moquaient des renouvelables, gadgets amusants pour écolos rêveurs. Puis, surtout, cet appel explicitait des fondamentaux qui, 20 ans après, sont enfin au cœur des débats sur la transition énergétique : la sobriété, la rénovation performante, le quasi-100 % renouvelables.

Il s’ensuivit malheureusement deux décennies d’atermoiements pendant lesquelles la France n’a pas su prendre une trajectoire de transition claire et cohérente. Et dans laquelle elle s’engage aujourd’hui sans visibilité et à haut risque dans une énième « renaissance » du nucléaire, à l’exact inverse du slogan olympique : trop cher, trop tard, trop risqué.

Nous étions un peu seuls en 2003, heureusement soutenus par nos amis de Global Chance(2), Benjamin Dessus et Bernard Laponche. Mais pendant 20 ans et cinq moutures plus tard, le scénario négaWatt est devenu de plus en plus robuste. L’hiver dernier a montré que la seule sobriété permettait de réduire de 13 % la consommation d’électricité, de nombreuses mesures confirment que l’on peut diviser par trois la consommation d’énergie par une rénovation performante des logements et l’Agence internationale de l’énergie, dans son scénario « Net Zéro Energy », prévoit que 89 % de la production d’électricité sera en 2050 d’origine renouvelable…

Rien n’est gagné, bien entendu. Mais reste un fol espoir : qu’en 2043, pour ses deux fois 20 ans, l’Appel négaWatt ne soit plus qu’un texte anecdotique que l’on relira avec un sourire amusé, totalement dépassé par la pleine réalisation de ce qu’il proposait !

1. https://link.infini.fr/lappel2003 
2. global-chance.org

 

https://twitter.com/thierrysalomon

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