Créée il y a trois ans par deux architectes, l’association marseillaise R-Aedificare a su fédérer les acteurs de la construction autour du réemploi de matériaux issus de démolitions.
Si vous parvenez à faire du réemploi de matériaux à Marseille, vous pourrez en faire partout ailleurs ! » Bien décidées à faire évoluer le secteur crucial des déchets du BTP dans les Bouches-du-Rhône, Valérie Décot et Céline Lassaigne n’ont jamais prêté l’oreille aux Cassandre qui ne croyaient pas à leur projet. Créée fin 2016, l’association R-Aedificare – « reconstruire » en latin – a véritablement émergé en remportant l’appel à projets Fili Déchets, lancé par l’Ademe et la Région en 2017. « Le sujet portait sur la création d’une filière de réemploi en région Paca, relate Valérie Décot. Cette étape fondatrice nous a permis de cerner et fédérer bon nombre d’acteurs locaux comme les entreprises de démolition, de cibler des maîtres d’ouvrage publics et privés volontaristes et de sensibiliser les autres. »
Si compliqué le réemploi à Marseille ?
Trois ans plus tard, R-Aedificare est devenu l’un des moteurs du réemploi dans le bâtiment en Paca. Son champ d’action s’est même étendu de l’échelle du bâtiment à celle de la ville. L’association a récemment été missionnée – avec les bureaux d’études Altereo et Recovering –, par la Ville de Miramas pour étudier la faisabilité du réemploi local sur les dix ans à venir à l’échelle urbaine.
Déjà « territoire zéro déchet », cette commune de l’étang de Berre, proche de Marseille, a candidaté au programme européen LIFE Smart Waste. « Ce projet ambitieux s’inscrit dans une période de transformation de la ville, explique Céline Lassaigne. Notre mission : l’étude du gisement de matériaux issus des déconstructions, la quantification des besoins pour les opérations à venir (neuf et rénovation), la mise en adéquation des flux et la réalisation d’une plateforme de stockage pour 2021. »
À l’image des acteurs engagés dans l’économie circulaire, Valérie Décot et Céline Lassaigne pensent aujourd’hui à l’échelle urbaine avec comme but une massification des pratiques dictée par l’urgence climatique et la raréfaction des ressources. Car, si la réglementation européenne semble aller dans le bon sens avec un objectif de valorisation de 70 % des déchets du BTP en 2020, les textes ne font pas suffisamment le distinguo entre recyclage et réemploi. Or, selon l’architecte, on pense encore trop volumes et pas suffisamment bilan environnemental. « Certaines familles de matériaux ont un impact carbone plus élevé que d’autres (câbles, métaux, verre), d’où l’intérêt de les réutiliser plutôt que de les recycler », remarque Valérie. Le bilan environnemental de la valorisation matière n’est effectivement pas neutre.