« Boire un petit coup c’est agréable », chantait le refrain popularisé par Michel Simon et Gaby Morlay en 1947 dans le film Les Amants du Pont Saint-Jean. Après que le bouchon a roulé sur la table, l’histoire peut se poursuivre… dans vos murs. « Tous les jours, nous gaspillons un matériau précieux qui peut avoir une deuxième vie ! », s’étonne Christian Lenoir, qui a en effet utilisé des bouchons de liège qu’il a récupérés et broyés pour l’isolation de trois pièces d’une ancienne ferme qu’il a rénovée dans le Perche.
Si les panneaux de liège expansé figurent parmi les produits classiquement distribués dans les magasins de matériaux écologiques, le liège en bouchon reste quant à lui majoritairement considéré comme un déchet. Issu de la récolte de l’écorce spongieuse du chêne liège, le liège constitue un matériau naturellement isolant avec lequel des bouchons sont fabriqués depuis le XVIe siècle. Son imputrescibilité en avait même fait un matériau d’obturation dès l’Égypte ancienne. À la fois élastique et très léger, le liège se caractérise par une structure microscopique constituée de cellules remplies d’air. La subérine contenue dans leur paroi confère l’élasticité à l’ensemble du matériau.
Conductivité plus variable
« Chauffé à la vapeur, le liège subit une expansion identique à celle qui se produit lorsqu’on cuisine du pop-corn. Il emprisonne ainsi davantage d’air et devient encore plus isolant », explique Michel Lassalle, artisan bouchonnier liégeur à l’entreprise Aliecor dans les Landes, qui s’est aussi spécialisé dans les autres valorisations du liège (liège expansé, liège recyclé, panneau de parement, etc.). La conductivité thermique (λ) du liège expansé, présenté en granulé ou panneau, est de ce fait très satisfaisante puisqu’elle oscille entre 0,034 W/m.K et 0,042 W/m.K(1).
Afin de faciliter sa mise en œuvre en vrac, le bouchon de liège à recycler subit quant à lui un broyage. Le granulat obtenu présente un diamètre allant de moins de 2 mm à plus de 15 mm. « Mais le pouvoir isolant du liège de bouchon recyclé s’avère significativement plus faible : on l’estime entre 0,045 et 0,06 W/m.K, prévient Michel Lassalle. À la différence du liège expansé, qui est plus stable, le taux d’humidité du liège recyclé varie avec celle de l’air dans lequel il est placé, ce qui modifiera sa conductivité thermique. »
Autre facteur de variabilité : la pureté du matériau. Certains bouchons sont en effet élaborés avec du liège aggloméré et contiennent de la colle. Or, « la proportion de colle dégrade la conductivité thermique. À plus de 80 %, elle peut dépasser 0,06 W/m.K », précise l’artisan.