Autoconstruire : Et la maison bois passive jaillit de terre

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En Bretagne, Anne-Hélène et Pierre ont autoconstruit une maison passive en bois aussi naturels que possible. Et pour en augmenter la masse, ils ont largement profité de la terre de leur propre terrain. Six tonnes qu’ils ont déclinées en pisé, colombage, banchage et enduit.

Le couple s’est rencontré il y a six ans. Envieux de s’éloigner de Rennes, en Ille-et-Vilaine, ils se mettent en quête d’un terrain où habiter « au vert ». Pierre étant passionné d’énergie renouvelable, il nourrit le rêve d’une maison passive en bois. Son objectif : construire un logement qui consomme moins de 15 kWhep/m2.an et offrant une bonne étanchéité à l’air (moins de 0,6 vol/h).

« Je cherchais une dent creuse pour ne pas participer à l’urbanisation en lotissement », explique ce dernier. En mai 2019, quand ils trouvent un terrain non viabilisé à Poligné, sans arrivée d’eau ni d’électricité, avec un garage en taule pour seule construction, ils décident de se lancer. « J’ai flashé pour la vue plongeante sur la vallée de la Vilaine. J’imaginais déjà une baie d’angle pour profiter aussi du jardin de la voisine en contrebas et de la perspective », relate Anne-Hélène, professeure de lycée en design et arts appliqués. Orienté sud-ouest, tous deux se projettent dans un intérieur profitant de la lumière rasante du soir.

Architecture sans fioritures

Anne-Hélène et Pierre dessinent les plans après avoir listé certaines exigences. Prévoyant d’autoconstruire la maison, elle ne sera que sur un seul niveau pour ne pas augmenter la pénibilité du chantier. De conception simple, il n’y aura pas non plus de double pente pour le toit ni de décrochés en façade de manière à aboutir à une maison compacte adaptée au budget du couple et néanmoins qualitative et passive.

Le toit présente une pente de 4 % pour tenter de réduire les problèmes d’étanchéité que peuvent rencontrer les toits plats dans le temps. Sous le pare-pluie, un platelage en panneau de bois RWH est réalisé, sous lequel est insufflée la ouate de cellulose. Pour ventiler la toiture, une lame d’air ventilée s’ajoute à la lame d’air immobile qui sépare le frein-vapeur des plaques de plâtre intérieures.


Avis d’expert.e.s : Maisons passives, l’impact carbone en question



Pour être heureux, vivons sans chauffage !

Cela pourrait être l’adage des maisons passives. Basée sur le postulat que l’essentiel de la consommation d’énergie liée à la vie d’un bâtiment se joue au cours de son utilisation, cette labellisation pousse à la construction de bâtiments économes, en conservant à l’intérieur, en hiver, un maximum de calories apportées par les rayons du soleil, les occupants et les appareils.

Né en Allemagne à la fin des années 1980 et délivré par l’institut allemand Passivhaus (PHI), le label impose un besoin en chauffage (ou en froid) inférieur ou égal à 15 kWh par m2 par an, ou une puissance installée inférieure à 10 W/m², pour une température de 20°C dans toutes les pièces. Le résultat du test d’étanchéité à l’air N50, réalisé pendant et à l’issue des travaux sous 50 Pa de pression, doit être inférieur à 0,6 vol/h (l’ensemble des fuites d’air incontrôlées doit être inférieur à 0,6 fois le volume intérieur en 1 h), soit au maximum l’équivalent du volume d’une carte de crédit pour une maison d’environ 120 m².

Troisièmement, le besoin maximum en énergie primaire total (chauffage, éclairage, électroménager, informatique, etc.) est de 120 kWh/m2.an. Enfin, la proportion d’heures dans l’année où la température moyenne de chaque pièce dépasse les 25°C doit être inférieure ou égale à 10 %. « Ces critères sont ceux à respecter dans le neuf partout dans le monde pour obtenir le label. En rénovation, l’existant ayant parfois des contraintes fortes, les performances à atteindre varient en fonction des zones climatiques », explique Laurence Bonnevie, présidente de l’association La Maison passive, organisme habilité à instruire en France les dossiers de labellisation pour le PHI.

Très exigeant thermiquement, le label ne s’intéresse pas, en revanche, à la quantité d’énergie utilisée pour la construction du bâtiment. Tous les matériaux sont permis. Un positionnement qui interroge, d’autant qu’un bâtiment passif en consomme beaucoup, notamment pour l’isolation qui doit être très performante dans les murs, la toiture et au sol (25 voire 30 cm au moins dans les murs et 35 voire 40 cm pour sols et plafonds).


Rénover : Rénovation, extension, surélévation une maison passive en trois temps

Renover maison passive

Rénovation, extension, surélévation

Adapter son logement à l’arrivée des enfants plutôt que s’éloigner du centre-ville, c’est le choix de cette famille qui voulait vivre sans voiture. Dix ans et deux agrandissements plus tard, leur deux-pièces girondin est devenu une maison passive.

Nous avions 25 ans et une envie folle de mettre en pratique pour nous-mêmes ce que nous préconisions aux autres», se souviennent Delphine et Mat­thieu, deux Bordelais arrivés au terme d’une longue aventure constructive.
Mais à partir d’un petit deux-pièces insalubre, ils ont bâti une maison passive de 135 m2 sur deux niveaux. Un projet ambitieux en trois étapes et trois matériaux.
Difficile de trouver le terrain adéquat dans la métropole bordelaise; d’autant plus quand les agences immobilières ne comprennent pas les critères recherchés par des clients formés au bioclimatisme. Mais en août 2009, il dénichent la perle rare à Talence : une maison de style échoppe de 45 m2, construite vers 1920 et orientée sud-est, sur un joli terrain de 350 m2 « La maison était dans un très grand état d’insalubrité. Tout était à refaire», décrit Delphine, conseillère info-énergie à la CLCV, membre du réseau Faire.
De l’existant ne seront conservés que les quatre murs extérieurs et le toit. Dalle, murs, charpente; en seule­ment un mois et demi, tous les matériaux sont mis à nus et la maison, isolée pour que les deux autoconstructeurs puissent emménager. Déplacée sur le passage latéral, l’en­trée est devenue un espace central qui délimitera les par­ties jour et nuit une fois l’extension réalisée.
Visant les performances énergétiques des bâtiments pas­sifs, les propriétaires soignent d’em­blée l’isolation. Mais côté rue au nord, les menuiseries sont remplacées par des fenêtres en bois à triple vitrage. La porte d’entrée, à l’est, en bois et double vitrage est aussi choisie pour ses performances.


Construire : Sur les pas de ceux qui ont réduit leur carbone

maison passive

Maison passive bas carbone

À Pornic (Loire-Atlantique), à 300 m de l’océan, cette maison passive conçue dans une optique bas carbone fait rimer confort et économie d’énergie. Un véritable cocon dont la compacité améliore la performance énergétique.

La vie en appartement dans le centre de Pornic, en Loire-Atlantique, était résolument trop étriquée pour Anne-Solène et Sylvain, son époux. Le désir de vivre proche de la nature avec le projet
de fonder une famille les mène à s’installer au Portmain, hameau de bord de mer proche de la plage éponyme, dans une zone classée en réserve conservatoire du littoral depuis 2011.

Mais la vie en décide autrement. Au rôle de mère de famille, Anne-Solène substitue d’autres engagements. Présidente de l’Association pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap Pornic), engagée dans le collectif Nous Voulons des Coquelicots – appel pour l’interdiction de tous les pesticides de synthèse –, elle fait le choix d’une vie simple au rythme des saisons. La clé de voûte de cet équilibre durable ? La maison du couple, inscrite sur une parcelle d’environ 1 000 m2 où le « fait maison » prend tout son sens : produits ménagers au vinaigre blanc et savon noir, réduction des déchets, compostage et jardinage à quatre mains en mode permaculture, etc.

Conception précise et passive

Le choix constructif s’est porté sur une maison à ossature bois réalisée par l’architecte Philippe Brulé, le père d’Anne-Solène, spécialisé en bâtiment passif et bas carbone. « La réduction de notre impact environnemental, de manière globale (énergie, émission carbone), est une priorité absolue, d’autant que nous avons les connaissances pour y parvenir dans le respect des exigences budgétaires ! Ce qui m’a conduit tout naturellement à privilégier le bois en structure, confie l’architecte. C’est un matériau sain, naturel et renouvelable qui stocke le CO2 et qui nécessite peu d’énergie pour sa transformation. En témoigne la construction d’Anne-Solène et Sylvain, qui assure un stockage de carbone à hauteur de 10 t de CO2 via l’ossature et les différents isolants utilisés. Ce qui permet de compenser en grande partie le bilan carbone des fondations en béton, qui s’élève à 12 t d’équivalent CO2. »

Conçue selon les règles du Passivhaus Institut (PHI), cette maison réalisée en 2010 s’inscrit dans une démarche de sobriété. Elle vise en premier lieu à réduire au strict minimum les besoins énergétiques en chauffage et rafraîchissement. « La réussite d’une maison passive repose sur un juste équilibre entre l’épaisseur de l’isolation, la surface des baies vitrées, la qualité de l’étanchéité à l’air, la performance de la ventilation double flux et, enfin, les matériaux intérieurs, toujours avec l’objectif de se passer de chauffage et de climatisation. » […]


Construire : Chaume et béton cellulaire un mariage insolite

Chaume et béton cellulaire

Cette maison plantée sur la presqu’île de Guérande a fait le choix de l’alliance entre des murs maçonnés en béton cellulaire et une toiture traditionnelle en roseau. Une union atypique qui a bousculé les habitudes des professionnels.

Pour choisir les matériaux de leur future maison, les propriétaires ont donné carte blanche à leur architecte. « On voulait avant tout une maison qui consomme peu d’énergie, très confortable et qui ne sera pas dépassée quand les bâtiments tendront obligatoirement vers le passif», expliquent Pascale et Julien Conquérant, vétérinaires. Béton cellulaire et chaume ont découlé de contraintes imposées, que le projet a su s’approprier pour en faire sa force. Mais les spécificités de ces matériaux dont les professionnels sont peu coutumiers ont requis adaptation et compromis.

Dans le parc naturel régional de Brière, ce terrain était soumis à des impératifs esthétiques, dont un toit de chaume. Les fabricants de fenêtres de toit n’ont pas prévu d’étanchéité pour cette couverture traditionnelle. « Après dix ans, le chaume se composte en surface et fond de 5 à 7 mm par an, détaille le chaumier Thierry Renard. On ne peut donc pas mettre une fenêtre au ras du roseau extérieur. » Il façonne des étanchéités souples pour tuiles afin de les intégrer dans l’épaisseur du chaume. « Au-dessus de la fenêtre, on crée une “moustache”. »

Climato-dépendant

Premier ennemi du chaume, l’eau déclenche le compostage. « Plus la pente est forte, moins l’humidité reste. En Brière, les pentes sont d’environ 50° et la longévité des toits de chaume, de 30 à 35 ans. En Normandie, avec 60° de pente, la durée de vie est plutôt de 50 ans. »

Reste à gérer les interfaces avec les autres corps de métier, non habitués à ce matériau. « L’étude thermique assimile 1 cm du chaume à de la couverture et les 39 autres à de l’isolation, complétée ici par de la laine de bois », indique Clotilde Dhennin, de Kaizen Architecture. Pour réduire les ponts thermiques, « j’ai demandé à ce qu’elle soit posée en deux couches croisées, une entre chevrons, l’autre entre pannes, ce qui obligeait le plaquiste à faire deux fois le travail. Habitué aux couvertures classiques ventilées, il pensait qu’on ne pouvait pas plaquer la laine contre le chaume. Je pensais au contraire qu’une lame d’air entre chaume et laine de bois risquait de provoquer de la condensation, abîmant l’un et l’autre ». Chantier bloqué ! Jusqu’à ce que Siga, fournisseur du frein-vapeur posé côté intérieur, confirme le contact entre laine de bois et chaume.

 


Reportage : construction passive

construction passive

Habitat bien pensé moins chauffé

De l’architecture de la maison à ses équipements, en passant par sa structure et son isolation, il est possible de jouer sur bien des postes pour se rapprocher de l’autonomie en chauffage. En la matière, la construction passive est un vivier de bonnes idées.

Imaginé en Allemagne à la fin des années 1980, le modèle de la maison passive, prend de l’ampleur. En effet, en France, on estime à 3 000 le nombre de ces bâtiments.

Le concept repose sur trois objectifs : consommation d’énergie de chauffage inférieure à 15 kWh/m².an, étanchéité de l’air à 50 Pa inférieure à 0,6 vol/h, énergie totale inférieure à 120 kWh/ m².an. La méthode, pour y arriver, consiste à « maximiser les apports solaires et réduire au plus bas les déperditions thermiques », résume Jean-Claude Tremsal, président d’honneur de la FFCP. Les matériaux ayant gagné en accessibilité, il est plus aisé de construire passif aujourd’hui. Pour autant, pas facile pour un particulier. En effet, les critères sont plus atteignables sur de gros bâtiments et dans les régions à l’apport solaire important. En outre, le niveau de technicité est élevé. « Réaliser une maison passive en autoconstruction me semble difficile, poursuit l’expert. Pour l’enveloppe, on peut y arriver, mais le système de ventilation pose des difficultés même aux professionnels. »

 


Construire : Une mobilité immobile à l’air industriel

maison à l'air industriel

Mobilité immobile, une maison  à l’air industriel

Dans un quartier de Saint-Avé (Morbihan), Mélanie et Haroun ont su marier un amour pour l’habitat mobile et les squats de friches industrielles avec une maison en bois passive qui respire la douceur de vivre.

Haroun s’était promis de ne jamais vivre dans une maison. Nous le rencontrons pourtant avec Mélanie et leur bébé dans un bâtiment passif flambant neuf, dans un quartier résidentiel près de Vannes. Mais derrière ses apparences on ne peut plus sédentaires, cette maison à l’air industriel perchée recèle bien des aspirations vagabondes.

« J’ai quitté la Tunisie à 21 ans pour des études d’architecture en France, retrace Haroun Chehata, 40 ans. Le déracinement a provoqué quelque chose en moi : le nomadisme. Il était devenu très difficile de me poser à un endroit. »

Il vit en camion, en caravane, ouvre un restaurant mobile, continue de vivre en caravane quand il rencontre Mélanie Cadio il y a cinq ans. Le virage se dessine quand des amis leur parlent d’un terrain à vendre au bord de leurs 5 ha de maraîchage bio.

« C’était tout ou rien, soit la caravane, soit une maison écologique et passive avec ce qu’il faut de temps pour étudier le projet, trouver des entreprises locales… »

Une maison à l’air industriel et modulaire

Mélanie et Haroun ont tout de même injecté une dose de mobilité dans leur habitat fixe. Stratégie n° 1 : la modularité.

« Baya n’était pas née, mais je voulais lui prévoir une chambre, se souvient Mélanie, 34 ans. J’avais du mal à comprendre Haroun qui disait : ” Ça ne sert pas tout de suite, donc on verra plus tard. La maison bougera. ” »

Une structure bois est en cours de confection pour lui servir de chambre sur roulettes, à l’étage.

« Elle n’a pas besoin de chambre fermée pendant les premières années », reconnaît Mélanie.

Mais l’espace devait être conçu pour être techniquement transformable rapidement, sans gros travaux.


Habitat groupé : Ecoravie, la fête de l’humain

habitat groupé participatif

Ecoravie, la fête de l’humain

L’habitat les techniques constructives, les jardins, les potagers, tout cela serait bien peu de choses si l’humain n’était pas au centre de la démarche. Telle est la philosophie d’Ecoravie, expérience d’habitat groupé réussie dans la Drôme.

La structure en pin douglas du premier habitat collectif d’Ecoravie resplendit sous les lumières matinales de cette journée ensoleillée de mai. Installée dans le beau séjour lumineux de son appartement, Claire se souvient :

« Au début, nous étions de doux rêveurs, nous voulions une petite maison individuelle pour chacun. Mais très vite, une conscience collective a pris le dessus et nous avons compris qu’il fallait s’orienter vers un habitat collectif. Il y avait ce grand terrain constructible au-dessus de la ville… »

Un habitat groupé participatif

L’aventure débute il y a sept ans. Constituées en un petit groupe de réflexion, les personnes intéressées par l’idée d’un habitat collectif affinent au fil des réunions et des rencontres les formes du projet. À l’issue de cette phase préparatoire, l’association Ecoravie est créée et deux terrains attenants au centre-ville sont achetés. Seul bémol, ils ne disposent d’aucun accès. Intervient alors une vente aux enchères qui permet à l’association d’acheter un terrain permettant justement d’accéder aux deux parcelles. Pour participer à cette vente, l’association doit momentanément se former en SCI, statut dont le côté spéculatif rebute le groupe, aussi est elle rapidement transformée en SAS coopérative, qui rend les habitants collectivement propriétaires des lieux et locataires de leur logement.

Sur le papier, le futur collectif prend forme, conforme aux règles d’urbanisme – un minimum de 18 logements sur les deux parcelles acquises. Les bases matérielles posées, le terrain acquis et le mode constructif défini, il faut encore investir collectivement les bâtiments, travailler « l’humain », les interactions et l’implication de chacun. Pour cela, les habitants s’appuient sur une charte générale aux énoncés simples, créée dès l’origine du projet : respect de la nature, de soi-même et des autres. […]


Construire : une maison en paille préfabriquée

maison paille préfabriquée

Une passive en paille préfabriquée

Ils ne se déplacent pour ainsi dire plus qu’à pied ou en vélo. Le projet de la famille Dallet a atteint son objectif : réduire le plus possible une empreinte écologique bien trop grevée à leur goût par des déplacements en voiture fréquents et le fonctionnement d’une maison énergivore sur l’ensemble de son cycle de vie. Jusque là, le couple vivait en effet dans une habitation individuelle excentrée et édifiée avec des matériaux conventionnels. Ils y sont restés 30 ans avant de se lancer dans leur nouveau projet. Ils décident alors de rechercher le terrain idéal il y a trois ans environ.

La quête a abouti à une parcelle proche du centre-ville d’Auray, orientée sud-sud ouest comme l’exige la construction passive. Pas trop grande, d’une superficie de 890 m2 et intime en dépit de la division du terrain initial en deux lots. Le couple proche de la retraite s’est ensuite abondamment documenté, de salons de l’habitat en lectures, sur les qualités des matériaux naturels, la construction passive, le bioclimatisme. Engagée, la démarche de ces militants du réseau Alternatiba(1) se veut globale, jusque dans les moindres détails. Ils ont même mandaté une étude géobiologique afin de repérer les zones de haute énergie qui perturberaient le sommeil.