Témoignages : Les 13 commandements d’un chantier serein



Autoconstruire est une sacrée aventure.

Pour qu’elle ne se transforme pas en épreuve, voire en cauchemar, voici les conseils tirés de nombreux retours d’expériences pour faire rimer chantier avec sérénité.

La fleur au fusil tu ne partiras pas

Soyez conscient de ce qui vous attend, sans sous-estimer la charge, ni surestimer vos capacités (travailler soirs, week-ends…). Il y aura des moments de doute, de fatigue, de stress. Pour se rendre compte de la réalité d’une autoconstruction, rencontrez, discutez, lisez…

Au plus près du chantier tu habiteras

Pendant qu’Adeline et Nicolas (22) bâtissaient la maisonnette de 15 m2 où habiter durant le futur « vrai chantier », « il fallait encore plus anticiper, transporter le matériel… On ne se déplaçait pas pour une soirée. En habitant sur place, c’est aussi plus simple de réceptionner les livraisons. Sans la pression d’un double loyer, on a pu finir les travaux avant d’emménager et faire des pauses pour préserver notre corps et notre couple ». D’autres installent une caravane, une yourte, ou un mobil-home comme Martin (42) : « Notre bébé venait de naître. Je ne serais pas rentré dans notre location à 15 km pour manger avec eux le midi. En vivant sur place, on se retrouvait plus souvent. » Revers de la médaille pour Ben et Lola : « On ne décroche jamais, le chantier est là, il t’appelle. Mais si ça évite un quart d’heure de voiture tous les jours, sur quatre ans, ça économise pas mal de gazole ! Et même quand tu as des enfants, tu peux y aller 1 h par-ci ou 3 h pendant la sieste. » Mais Amélie (33) préférait « pouvoir rentrer au chaud, me doucher, ne pas trouver mes enfants couverts de boue. Notre plan de financement global permettait de nous accorder un an de location ».

Le confort du lieu de vie provisoire tu ne négligeras point

Morgan (29) a protégé son mobil-home sous le futur carport, y a ajouté une isolation en paille et un poêle pour obtenir « 40 m2 confortables ». Le chantier pèse moins sur le quotidien quand le lieu de vie est entretenu, praticable et pratique. Sa surface étant réduite, vous passerez du temps dehors ; aménagez une terrasse « hors boue », une pergola, agrémentez de quelques fleurs… Stéphanie et Julien (44) investissaient une caravane sur leur terrain l’été, mais louaient à 20 min le reste du temps. « Tu es moins efficace, mais tu rentres dans un endroit propre et tu coupes du chantier. »


Sécurité : Les clés d’un chantier sans dangers



Sur un chantier, les risques sont nombreux. Et l’autoconstruction ne déroge pas à la règle.

Prévention, bons équipements, consignes de sécurité, bonnes postures et organisation sont les clés pour assurer la sécurité de tous·tes.

C’est une expérience dont Olivier Carpentier se souviendra longtemps. Lui qui pensait avoir tout prévu en termes de sécurité sur le chantier d’autoconstruction de sa maison, en Ille-et-Vilaine, a vu son doigt arraché par la bétonnière de seconde main qu’il s’était procurée. ;« Il manquait le clapet de protection sur l’engrenage. Je faisais très attention quand elle était en marche. Mais, en la nettoyant alors qu’elle était éteinte, je l’ai fait tourner manuellement, mes gants ont glissé et ma main a été prise au piège. Sans gants, j’aurais sûrement perdu ma main », raconte-t-il.; « Ces choses arrivent malheureusement, surtout avec du matériel d’occasion », prévient Roselyne Laurent, l’architecte qui a dessiné les plans de la maison d’Olivier.

Préparer l’accessibilité

Sur un chantier, le risque zéro n’existe pas. Il est d’autant plus important chez les autoconstructeurs, dont ce n’est pas le métier. Du fait de leur légèreté, tronçonneuses et disqueuses, notamment les petites, sont souvent tenues à une main et sans bons appuis, augmentant le risque de se couper. Les scies circulaires et leur possible retour de lame sont aussi particulièrement dangereuses. 

Christelle Dupont, encadrante de chantiers participatifs terre-paille en Bretagne et en Pays-de-la-Loire et cofondatrice de l’association Botmobil, mise sur la prévention. Avant le chantier, l’artisane fournit aux porteurs de projet une liste détaillée du matériel (dont l’essentiel extincteur) et des outils nécessaires, ainsi qu’une pharmacie à prévoir pour les premiers soins (voir encadré p. 66). « Nous envoyons aussi un document résumant les consignes de sécurité sur un chantier; les usages appropriés d’éléments tels qu’escabeaux, échelles, outils électroportatifs. Avec les autoconstructeurs, nous préparons l’accessibilité du chantier avant l’arrivée des bénévoles pour qu’il se déroule dans de bonnes conditions. Si le terrain est cabossé, on l’aplanit. Si la maison est construite sur pieux, ou pas au même niveau que le sol extérieur, on fabrique une rampe en bois solide et stable. Cela évite d’avoir à enjamber une structure ou de marcher sur deux parpaings empilés », indique-t-elle.


Bonnes pratiques : Réussir un chantier participatif



Pour l’organisateur, le chantier participatif maintient le moral dans la durée : un chantier long est un marathon.

Les bénévoles souhaitent apprendre, rencontrer des gens qui partagent leurs valeurs, s’essayer en vue de préparer leur projet. Bonnes pratiques pour que chacun y trouve son compte.

S’il fallait décrire un chantier participatif en un seul mot, ce serait convivialité. Les travaux deviennent prétexte à partager une aventure humaine riche d’apprentissages et de nouvelles relations. À condition de respecter quelques bonnes pratiques.

En France, le chantier participatif bénéficie du regain d’intérêt pour les techniques écologiques ou patrimoniales, gourmandes en main d’œuvre, et d’une aspiration à se réapproprier l’acte de bâtir. L’intensité sociale d’un chantier participatif est la motivation essentielle : rencontre, échange, partage, émancipation… Ceci sans réciprocité (recherche d’équivalence dans l’échange) : l’hôte offre l’opportunité de participer, le volontaire offre sa participation. Et à l’issue du chantier, chacun s’en retourne gagnant, sans devoir se sentir redevable.

On trouve trois profils d’intervenants :

• L’organisateur, aussi appelé maître d’ouvrage ou hôte, est le propriétaire du bâtiment en travaux. Sa présence en continu est indispensable pour le bon déroulement du chantier participatif.

• Le bénévole, aussi nommé participant ou volontaire, peut être un proche ou un inconnu.

• L’accompagnateur professionnel : entreprise ou association, il guide le chantier. C’est une option, facultative si l’organisateur a les compétences pour remplir ce rôle de sachant.


Reportage chantier accompagné : bois, paille et terre, trio gagnant

chantier accompagné

Cette maison bois en poteau-poutre, paille et terre a été bâtie par un autodidacte. Mais l’autoconstruction n’est pas vouée à la solitude. Pour mener à bien son projet, Paul a su se faire accompagner par des professionnels et de nombreux bénévoles.

Entre faire construire une maison et en construire une, Paul et son ex-compagne hésitent longuement. Réflexion faite, ils choisissent un mix des deux options, séduits par un vaste terrain sur les bords du Clain. Objectif : réaliser une maison bois-terre-paille. « Le fruit d’une sensibilité écologique héritée de mes parents et de mon travail chez Biocoop depuis six ans », confie Paul Baudouin. Pour mener à bien son projet, cet autodidacte en matière de construction s’entoure de professionnels : Bois & paille charpente pour la structure poteau-poutre isolée en paille, la conception technique et l’accompagnement sur chantier, Alternative Habitat pour l’étude thermique, Chaux & Co pour les enduits.

Mobilisés grâce aux réseaux sociaux (Facebook et Twiza) 90 bénévoles participent au chantier d’août 2017 à octobre 2019. Famille, amis et clients du magasin où il travaille prêtent main forte. « Une aventure humaine riche en échanges et convivialité. »

Après avoir visité des maisons construites par Bois & paille charpente, Paul choisit une structure poteau-poutre isolée par l’extérieur en botte de paille.

 


Territoire : Une mairie autoconstruite

mairie autoconstruite

Les citoyens ont écobâti leur mairie

Passé Apt, tournez à gauche, montez, montez… La petite route de garrigue escarpée, s’élevant sur le flanc sud des Monts de Vaucluse, mène à Viens, petit village juché à quelques 600 m d’altitude. Les 630 habitants y jouissent d’une vue sans fin sur le bassin du Calavon ; le grand air donne sans aucun doute de très bonnes idées… Mme la mairesse, Mireille Dumeste, m’attend dans la salle du Conseil de la mairie, où règne une température et une hygrométrie agréables, propres aux constructions bois-paille. Six habitants ont répondu présent à l’appel de Mireille Dumeste pour témoigner d’une expérience collective inédite, le chantier participatif mené deux ans plus tôt pour construire la mairie. Une quarantaine de personnes du village – soit presque 10 % de la population – étaient de la partie.

L’ancienne mairie, située dans un bâtiment classé à quelques mètres de la nouvelle, était vétuste, hors normes, énergivore. Sa rénovation trop coûteuse et l’achat d’une maison du village ayant échoué, Mireille Dumeste, avec trois adjoints, lança une idée originale : pourquoi ne pas construire un bâtiment neuf en matériaux naturels.

 


Extérieur : la cabane boule

cabane boule

Tresser sa cabane boule.

La cabane de Robinson, tous les enfants en ont rêvé, Alain Auguste l’a réinventée. Sa démarche invite à la réaliser par soi-même avec quelques morceaux de bois glanés et de la ficelle.

L’éco-lieu Artimbal se cache au coeur des Cévennes, à Roquedur (Gard). Il faut se garer et grimper jusqu’au lieu de vie en forêt pour découvrir les créations d’Alain Auguste, disséminées dans ce bel échantillon de la générosité du milieu naturel cévenol. Si le coeur vous en dit, des stages « Cabanes vannées et yourtes vivaces » sont organisés tout au long de l’année. Ainsi, lors de ces stages de quelques jours, Alain partage sa technique de « cabane boule » en animant des chantiers participatifs. Ce Robinson des temps modernes utilise les matériaux présents autour de lui et tente de créer des habitats légers avec un outillage minimal.

 


Alternatives : Copeauxcabana

Copeauxcabana

Copeauxcabana, joyeux bâtisseurs.

Au départ, une bande d’amis passionnés par le travail du bois ; à l’arrivée un projet de vie où se mêlent écologie et partage des savoirs. Avec, en prime, un grand sens de la fête !

«La fête ? Parfois, on la fait même un peu trop ! », s’esclaffe Yogan dans un large sourire. Mais, reprenant vite sa tâche, il se fraye un chemin pour aider un garçon à finir une cuillère en bois taillée dans une chute de chêne. Une centaine de personnes est réunie ce dimanche dans le grand atelier des copeauXcabana à l’occasion du Spoonfest (festival de la cuillère en anglais).

Yogan et son ami Menthé, les deux fondateurs de copeauXcabana, ne manquent d’ailleurs pas de sérieux. En effet, depuis dix ans, le premier enchaîne les expériences et les CAP. Il « s’intéresse à toutes les facettes de la construction ».


Maisons écologiques et pas chères

Maisons écologiques et pas chères

Maisons écologiques et pas chères.

 

Construire avec des coups de main à tour de bras.

Préparation optimale, coups de main à foison, formes simples, récup’ et matériaux locaux, voici la recette d’Antonin et Sandra.

Une habitation de 100 m² ayant coûté moins de 50 000 € et autoconstruite en à peine trois ans ; voilà qui est rare. C’est pourquoi, Antonin Gaudun et Sandra Edde, les deux heureux propriétaires normands de cette maison à ossature bois isolée en bottes de paille, ne le cachent pas : ils ont dû traverser une expérience « fatigante ». Mais qui reste néanmoins un excellent souvenir.
Ainsi, bien préparé, bien accompagné, leur chantier s’est déroulé sans gros accroc

 

Et ils habitèrent la terre.

Maisonnette en pisé, une poterie géante.

Ma participation comme journaliste à La Maison écologique depuis 2009 a précédé de peu la construction de notre première maison. C’est dire si ce magazine nous a accompagnés ! Pour une fois, j’ai le plaisir d’y évoquer ma propre expérience. En 2010, nous nous sommes installés à Saint-Michel-Loubéjou, dans le Lot, dans une noyeraie. Mon compagnon Benoît Musquar, potier de profession, souhaitait construire une maison en pisé (terre banchée et damée). « J’ai aimé la sensation enveloppante de dormir dans une maison en terre au Sénégal », se souvient-il.

 

L’autoconstruction de toutes les aventures.

Ou comment construire sa maison sans aucune expérience.

Fabrice Mélet et Marianne Garel donnent foi en l’autoconstruction. Respectivement professeur de SVT et ouvrière agricole, le couple ne possédait pourtant aucune expérience. Ils compensent en s’abonnant à La Maison écologique et en lisant de nombreux ouvrages. Mais lors de leur mutation dans les Cévennes, ils caressent un vague projet d’achat de maison ancienne. Mais les tarifs ne conviennent pas à leur budget. En 2000, ils trouvent un terrain. Ils commencent alors à se renseigner et visitent de nombreuses maisons écologiques à Nîmes et Uzès. Néophytes, ils font appel à une architecte, sensée être rompue à la construction bois-paille. Ils s’avèrent mieux informés qu’elle et l’abandonnent lorsqu’elle leur propose un projet à 300 000 € alors que leur budget est de 100 000 € !

 

Pris les mains dans le bois.

Une année pour autoconstruire une maison qui respecte la RT 2012

Lorsqu’en 2012, Alexandre et Caroline Ponsardin recueillent l’expérience d’un autoconstructeur d’Eure-et-Loir, ils sont d’emblée mis en garde : « Savez-vous qu’un couple sur deux divorce en autoconstruction ? » Et pan ! Mais, pas de quoi effrayer ce jeune couple, bien décidé à construire lui-même la maison de ses rêves. Une idée qui est venue « naturellement ». A cette époque, les deux ingénieurs, jeunes parents d’un petit Owen âgé d’un an, n’ont aucune idée de ce qui les attend, mais, après avoir cherché des maisons (toujours trop chères) à rénover, ils se lancent.

 

Comme sur des roulettes.

Pour se loger à petit prix, Muriel a choisi la Tiny! Sa mini maison baladeuse de 16 m2 est montée sur remorque.

“Ma vie est plus compacte, je pèse moins sur la Terre », apprécie Muriel Fry dans un délicieux accent british. Après avoir travaillé dans les arts plastiques, elle prend sa pré-retraite suite à un licenciement et quitte l’Angleterre en 1996. Puis, elle restaure une fermette en Mayenne, puis démarre la rénovation d’une grande maison de maître dans l’Orne.

 


Autoconstruire

forces et chantiers

Ils unissent leurs forces et leurs chantiers. 

L’entraide pour ne pas s’épuiser lors de leurs chantiers mais, au contraire, s’enrichir en partageant leurs forces, leurs compétences et leur énergie positive.


Ensemble

chantier participatif paille

Chantiers enchantés.

L’association Botmobil réinvente le chantier participatif depuis dix ans en France. Maison en bottes de paille, enduits terre, rénovation : l’immersion sur un vrai chantier, aux côtés d’un professionnel, est une expérience unique pour apprendre.