Rénover : Sur les parpaings, la paille

RENOVER PAILLE

Quand la moisissure est apparue dans leur maison tout juste acquise, les Ehrlich n’ont pas perdu de temps pour la rénover et l’assainir avec des matériaux simples et naturels.

Et beaucoup de réemploi.

Au sol, une ligne d’émaux, type Briare, longe les murs. Ces petits carrés de mosaïque sont bleus ou beiges selon les pièces. Ils comblent le vide laissé dans le carrelage par l’ancien isolant, un complexe de plaque de plâtre et de polystyrène, que la famille Ehrlich a ôté pendant la rénovation de sa maison. Une rénovation qui s’est imposée quand, dès le premier hiver de leur installation, de la moisissure est apparue sur les murs des chambres d’Emélie et Marlène, les filles de Volker et Ria. « Il était hors de question que l’on fasse vivre nos enfants dans un milieu malsain », lance Volker en bon père et architecte de métier. Bien qu’il aurait « préféré simplement poser [ses] valises », souffle-t-il, en se balançant sur sa chaise de jardin.

En 2018, quand ils emménagent dans ce quartier pavillonnaire de Poissy, dans les Yvelines (78), « la maison paraissait belle et propre », fait-il savoir d’un sourire narquois. À l’image de toutes ses voisines des années 1960, elle était plutôt cubique, disposée au milieu de 400 m2 de terrain. Sa façade crépie de ciment, son toit à quatre pans, une allée cimentée descendant au garage et un petit escalier en béton menant au palier. À l’intérieur, des murs lisses, blancs, lessivables, du carrelage, des fenêtres en PVC. « L’ancien propriétaire, un maçon, avait dépensé beaucoup d’énergie à la rénover lui-même… », assure Volker. Mais ces matériaux trop étanches ont empêché les murs de laisser s’échapper la vapeur d’eau et fait condenser l’humidité au niveau des ponts thermiques : les angles des murs orientés nord, autour des fenêtres et au niveau des rejingots (partie supérieure des appuis de fenêtre). La famille n’a d’autre choix que purger la structure, puis l’isoler à nouveau.

Faire respirer de nouveau

En ôtant le complexe BA13/polystyrène sur les deux niveaux de la maison, sous-sol et rez-de-chaussée, ils découvrent les murs de parpaings enduits de 3 ou 4 cm de plâtre et recouverts par autant de couches de tapisserie que la maison a accueilli de vies. Par chance, « la moisissure était principalement sur l’isolant, précise Volker. On a remis les murs à nu et on les a abrasés avec du papier à poncer jusqu’à redonner au plâtre sa blancheur ». Seules les pièces humides – cuisine et salles de bains de l’étage et du sous-sol – conservent le complexe isolant, revêtu de carrelage (d’origine pour l’étage) qui crée une paroi étanche, « pour des économies de travail ». Et de matière.

Le but étant de faire « respirer » de nouveau la maison, place aux matériaux hygroscopiques en intérieur. Grâce à leurs petits pores, ils ont la capacité de fixer une partie de l’humidité de l’air environnant, puis ensuite de l’évacuer. Pour les murs des chambres et du salon, la famille choisit des enduits prêts à l’emploi en argile, sable et paille de lin (marque DeWulf). Ils s’appliquent en deux passes, directement sur le plâtre. Pour que ce dernier n’absorbe pas l’humidité nécessaire à la prise de l’enduit posé ensuite (ép. 7 mm) tout en favorisant son adhérence, une sous-couche est d’abord appliquée au pinceau. La terre est choisie plus ou moins brune selon les pièces. Aujourd’hui, la lumière l’anime de reflets dorés et d’ondulations laissées par les coups de taloche.


Avis d’expert·es : Un panel d’options pour isoler les soubassements



L’isolation des soubassements d’un bâtiment neuf ou en rénovation ne doit pas être négligée.

D’une part, cette partie basse des murs posée sur les fondations forme « les bottes » du bâtiment. Les soubassements des bâtiments neufs doivent donc « rester bien étanches pour éviter les remontées capillaires », rappelle Jean-François Bebin, gérant de l’entreprise de conseil en écoconstruction et de négoce de matériaux écologiques Eko Etik Matériaux (35), car ils supportent directement les murs porteurs. Pour autant dans le bâtiment ancien, l’isolation « ne doit surtout pas bloquer l’humidité, mais permettre au contraire son évacuation, sous peine d’entraîner des dégradations du mur », poursuit l’ancien artisan en maçonnerie. D’autre part, dans le cas d’un chantier de rénovation, si les soubassements s’avèrent en contact direct avec la dalle, ils relaient un pont thermique qu’il va falloir limiter autant que possible pour éviter les déperditions de chaleur.

Pour répondre à ces enjeux, « il n’y a que peu de matériaux dans la sphère des biosourcés, résume Jean-François Bebin. Nous préconisons généralement des plaques de liège ». Sous forme expansée, le liège affiche en effet des qualités ad hoc : conductivité thermique (λ) entre 0,036 et 0,042 W/m.K, résistance à la diffusion de la vapeur d’eau (λ) de 5 à 30 et imputrescibilité. Présenté en panneau (jusqu’à 300 mm d’épaisseur), il peut être fixé sans grande difficulté sur le soubassement. En construction neuve, il trouve souvent sa place côté intérieur, en continuité de l’isolant sous dalle, afin de couper tout pont thermique. En rénovation, si l’on ne peut intervenir sur la dalle, il est alors fixé sur la face extérieure du soubassement.

Liège : des hôtes malvenus

La fixation des panneaux rigides de liège appelle cependant plusieurs précautions. « La continuité du contact entre le liège et la maçonnerie doit être maximale, car toute poche d’air peut générer des gouttes d’eau lors du transfert d’humidité », pointe Jean-François Bebin. Dans ce but, les panneaux « doivent être vissés ET collés », renchérit Nicolas Delbarre, du magasin Amboise maisons et matériaux écologiques (A2ME), en Indre-et-Loire. Le vissage s’effectue au moyen de chevilles rosaces (tous les 30 cm environ et à chaque angle). La colle, idéalement perméable à la vapeur d’eau (par exemple, Aera chaux, de la marque Fixalit), « est soit disposée partout à l’aide d’un peigne, soit sous forme de deux boudins horizontaux en haut et en bas afin d’éviter la convection d’air qui nuit à l’isolation, précise Nicolas Delbarre. Si une isolation thermique par l’extérieur (ITE) est prévue, mieux vaut choisir des panneaux de liège de 145 mm, car les panneaux de fibre de bois [ou autre isolant biosourcé, ndlr] utilisés pour la partie supérieure du mur, au-delà des premiers 20 cm minimum, ont généralement cette épaisseur ».

Malgré son imputrescibilité, rare dans la famille des matériaux biosourcés, un problème s’observe en cas d’usage de liège en conditions extérieures : il plaît aux insectes, en particulier aux fourmis qui le colonisent volontiers. Celles-ci déstructurent les panneaux, qui perdent alors leur effet thermique et d’étanchéité. « Entre 10 cm dans le sous-sol et jusqu’à 10 cm au-dessus du sol fini, les fourmis  peuvent investir le liège, observe Nicolas. En-dessous et au-dessus, le risque est bien moindre. » La protection des panneaux de liège par recouvrement a un intérêt esthétique, mais empêche aussi toute intrusion d’insectes. Un enduit chaux-sable peut tout à fait convenir, à condition que les plaques aient été solidement fixées au soubassement pour éviter les risques de mouvement et de fissure. « Un dressage sur le liège, dans lequel on noie un treillis en fibre de verre prépare le support pour l’enduit de finition », poursuit Nicolas Delbarre. 


Écoconstruire : Leur maison paille se passe de chauffage

ECOCONSTRUIRE

À l’ombre de grands cèdres, dans la Vienne, la maison bois-paille de Sophie et Arnaud a été conçue pour répondre à leur envie de sobriété : chez eux, pas de système de chauffage en hiver, ni de climatisation en été.

Dès ma plus tendre enfance, je rêvais d’une maison en bois au milieu de la forêt », raconte Sophie. Originaire du Limousin, son père charpentier l’a élevée dans l’univers du bois, un « matériau inscrit dans [s]on ADN ». Après avoir vécu de nombreuses années en location avec leurs deux garçons Isao, 18 ans, et Julen, 8 ans, Arnaud, professeur d’éducation socioculturelle, et Sophie, assistante maternelle, ont eu envie d’un refuge familial à leur image, en accord avec leurs convictions et leur façon de vivre. « On a d’abord cherché une longère et une grange à retaper », retrace Sophie. La découverte d’une parcelle de 1 800 m2 idéalement située en sortie du bourg de La Chapelle-Moulière (86), à deux pas de la forêt de Moulière, provoque un déclic. Le terrain « entièrement clos et arboré, se prêtait à merveille au projet d’une maison bois bioclimatique parfaitement intégrée au paysage », confie Arnaud. Pour rester dans l’écologie tout en se décidant à entamer un projet de construction, ils optent finalement pour « une maison ossature bois isolée en paille ». 

Apports solaires et confort d’été

Sophie et son fils Isao dessinent les plans de la maison en 3D et le bureau d’études Imagerie 3D, à Vouillé (86), établit les plans de construction. Ophélie Largeau, thermicienne, réalise quant à elle une étude thermique pour conseiller les propriétaires qui veulent s’approcher du passif. « Cet objectif ne pouvait être atteint qu’en trouvant un juste équilibre entre l’épaisseur de l’isolation, la surface de baies vitrées, la qualité de l’étanchéité à l’air, la performance de la VMC double flux et les matériaux intérieurs, avec l’objectif de se passer de chauffage et de climatisation »,
explique Ophélie.

L’orientation bioclimatique de la maison est mûrement réfléchie. En hiver, les grandes surfaces vitrées (28 m2 de vitrages) au sud et à l’est permettent de profiter de la chaleur du soleil. Un apport passif de chauffage, renforcé par le choix d’un triple vitrage doté d’un filtre Solar XPlus (Internorm) dont le traitement de couche est destiné à optimiser l’apport solaire. Pour le confort d’été, les protections solaires ont aussi été passées à la loupe : « Au sud, un débord de toit de 90 cm évite le rayonnement solaire à l’étage pour prévenir la surchauffe tout en laissant passer les rayons en hiver, car le soleil est alors plus bas », poursuit Ophélie. À l’est et à l’ouest, des stores en bambou amovibles et posés à l’extérieur protègent de la chaleur.


Construire : Chaume et béton cellulaire un mariage insolite

Chaume et béton cellulaire

Cette maison plantée sur la presqu’île de Guérande a fait le choix de l’alliance entre des murs maçonnés en béton cellulaire et une toiture traditionnelle en roseau. Une union atypique qui a bousculé les habitudes des professionnels.

Pour choisir les matériaux de leur future maison, les propriétaires ont donné carte blanche à leur architecte. « On voulait avant tout une maison qui consomme peu d’énergie, très confortable et qui ne sera pas dépassée quand les bâtiments tendront obligatoirement vers le passif», expliquent Pascale et Julien Conquérant, vétérinaires. Béton cellulaire et chaume ont découlé de contraintes imposées, que le projet a su s’approprier pour en faire sa force. Mais les spécificités de ces matériaux dont les professionnels sont peu coutumiers ont requis adaptation et compromis.

Dans le parc naturel régional de Brière, ce terrain était soumis à des impératifs esthétiques, dont un toit de chaume. Les fabricants de fenêtres de toit n’ont pas prévu d’étanchéité pour cette couverture traditionnelle. « Après dix ans, le chaume se composte en surface et fond de 5 à 7 mm par an, détaille le chaumier Thierry Renard. On ne peut donc pas mettre une fenêtre au ras du roseau extérieur. » Il façonne des étanchéités souples pour tuiles afin de les intégrer dans l’épaisseur du chaume. « Au-dessus de la fenêtre, on crée une “moustache”. »

Climato-dépendant

Premier ennemi du chaume, l’eau déclenche le compostage. « Plus la pente est forte, moins l’humidité reste. En Brière, les pentes sont d’environ 50° et la longévité des toits de chaume, de 30 à 35 ans. En Normandie, avec 60° de pente, la durée de vie est plutôt de 50 ans. »

Reste à gérer les interfaces avec les autres corps de métier, non habitués à ce matériau. « L’étude thermique assimile 1 cm du chaume à de la couverture et les 39 autres à de l’isolation, complétée ici par de la laine de bois », indique Clotilde Dhennin, de Kaizen Architecture. Pour réduire les ponts thermiques, « j’ai demandé à ce qu’elle soit posée en deux couches croisées, une entre chevrons, l’autre entre pannes, ce qui obligeait le plaquiste à faire deux fois le travail. Habitué aux couvertures classiques ventilées, il pensait qu’on ne pouvait pas plaquer la laine contre le chaume. Je pensais au contraire qu’une lame d’air entre chaume et laine de bois risquait de provoquer de la condensation, abîmant l’un et l’autre ». Chantier bloqué ! Jusqu’à ce que Siga, fournisseur du frein-vapeur posé côté intérieur, confirme le contact entre laine de bois et chaume.

 


Construire en béton cellulaire

béton cellulaire

Un confort en béton cellulaire

Emilie et Guillaume ne sont pas des militants écologistes de la première heure. Pourtant la qualité de vie promise par les maisons bioclimatiques en béton cellulaire proposées par leur maître d’oeuvre les a séduits.

Au bout de deux ans de recherche Émilie Boudin et Guillaume Perrochon étaient las de ne pas trouver de maison à rénover. Ils  se résolvent alors à solliciter des constructeurs. Mais « les maisons ” traditionnelles ” qu’on nous a proposées ne nous plaisaient pas. Par l’intermédiaire d’un client de mon mari qui travaille dans les produits du BTP, nous avons rencontré Bâti concept écologique (B.C.E.).  Nous avons visité une de leurs maisons, raconte Émilie Boudin. J’ai tout de suite accroché avec la philosophie de l’entreprise et le style d’architecture : les grandes baies vitrées, les économies d’énergie, les menuiseries… Je connaissais bien le béton cellulaire car mon grand-père avait fait réaliser une extension avec ce matériau. Il en était très content et cela lui apportait un grand confort de vie. »


Extension en béton cellulaire

extension en béton cellulaire

Pousser les murs avec le béton cellulaire.

Des blocs de béton cellulaire ont étendu l’aura de cette vieille maison en terre et pierre, ainsi réagencée et ensoleillée. Avec une grande attention portée aux énergies du lieu, cet extension a rallumé la flamme de la maison de Solange. Évitez de lui parler de chiffres et de dates, Solange Rivier serait bien embêtée pour vous répondre. « Je vis hors du temps, je suis beaucoup en voyage… », confie-t-elle. Solange habitait déjà depuis « 5 ou 6 ans » dans cette « vieille masure » quasi abandonnée dont elle avait habillé les murs de rideaux « pour cacher la misère » quand elle décide de la restaurer et de l’agrandir. Cette maison dauphinoise bâtie à Saint-Victor-de-Morestel, au sud-est de Lyon, est en pierres surmontées de pisé – de la terre crue compactée, technique répandue en Rhône-Alpes. L’extension de 42 m2 sera montée en blocs de béton cellulaire car « c’est un matériau léger, facile à manipuler, ignifuge, qui offre une bonne hygrométrie, une isolation [partielle, ndlr] et j’ai eu la chance de profiter d’un transfert d’entrepôt….


A la loupe : Le confort du béton cellulaire

maison béton cellulaire

Le confort du béton cellulaire.

Ils voulaient un habitat modulable, confortable, spacieux, près de la mer et des voisins. Nathalie et Johann ont trouvé leur bonheur en construisant dans le Morbihan une maison en béton cellulaire, puis une extension bois. Après quatre hivers, ils se félicitent de leur choix.